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Sylvia Tarip, célibataire, deux enfants : histoire d’une maman étudiante

DUMBÉA. Chaque vendredi, nous réalisons le portrait d’un étudiant en fin de cursus. Cette semaine, nous suivons Sylvia Tarip, résidente de Nondoué, qui rêve de devenir animatrice de patrimoine.
Écrit le 21 mars 2019

Courageuse, déterminée, ambitieuse… Voici des termes qui pourraient qualifier Sylvia Tarip, maman d’origine vanuataise, installée à Dumbéa depuis neuf ans. Et encore, les mots peuvent paraître faibles par rapport à l’ampleur de son parcours. Sur le terrain familial, à Nondoué, les enfants gambadent dans l’herbe et effectuent des allers-retours à la rivière. C’est encore les vacances et en plus, maman est là !

Pendant ses trois ans en licence, difficile pour Sylvia d’accorder du temps à ses deux fils. Son parcours ? C’est celui d’une femme qui n’a pas hésité à donner de sa personne pour offrir un avenir meilleur à sa famille. Sylvia effectue le début de sa scolarité à Port-Vila, à l’Ecole française privée, jusqu’à ses 20 ans. La jeune femme arrête les cours en seconde. « Je me suis dit que je n’avais pas le niveau. Il était temps de faire une petite pause pour faire le point. »

Pendant un an, la Vanuataise effectue des contrats dans des motels, comme agent d’accueil. Sylvia broie du noir et rêve de s’asseoir à nouveau sur les bancs de l’école. « C’est trop tard… » Hé bien non ! En lisant le journal, un jour, elle constate que l’Ecole de la seconde chance arrive dans son pays. C’est le tournant de sa vie.

Elle s’inscrit et enchaîne les réussites : les passages au niveau supérieur, l’obtention du diplôme d’accès aux études universitaires, l’équivalent du baccalauréat, et l’entrée en licence d’histoire à l’université de la Nouvelle- Calédonie en 2008. Mais la perte de son frère met un frein temporaire à ses études. « Cela m’a beaucoup affectée, il m’a fallu du temps pour me relever. »

Sylvia se met en couple et fonde un foyer à Dumbéa. Son premier bébé naît en 2011 et le second en 2012. « J’ai fait une parenthèse dans mes études. Je m’investis comme mère au foyer jusqu’à ce que mes enfants aient l’âge d’entrer à la maternelle ».

En 2015, ses deux fils intègrent un établissement scolaire. « C’était le moment ou jamais, malgré les réticences de mon conjoint de l’époque, leur père, j’ai décidé de continuer. Il le fallait, je n’étais pas venue en Calédonie pour rien ». Cette décision lui a, en partie, coûté son couple.

 

"JE NE LÂCHE RIEN"

« Mais ce n’est pas grave, je me préoccupe de l’avenir de mes enfants. » Sylvia s’installe chez sa soeur, à Nondoué. « La chance que nous avons en tant qu’Océaniens, c’est cette vie en communauté qui nous caractérise. Je suis partie vivre chez elle avec mes fils. Quand je n’étais pas présente, c’est elle qui gardait les gamins, avec son mari. Je leur suis reconnaissante. »

La jeune femme reprend alors les cours en licence. « Tous les jours je me levais à 4 heures pour prendre le car de 5 heures et je revenais avec le dernier bus, à 20 heures. Tout mon temps libre, je le passais à la bibliothèque. Je dormais rarement avant minuit. » Avec ces horaires, pas facile d’avoir une relation au quotidien avec ses enfants. « Avec mon instinct maternel, je pensais souvent à eux. Ça me faisait très mal. Quand je rentrais tard, ils dormaient déjà. On habitait dans la même maison mais parfois je ne les voyais pas pendant quelques jours. Le samedi aussi, j’étudiais à la bibliothèque toute la journée. Il y a un énorme travail à fournir à l’UNC, l’échec était inconcevable. ».

En 2017, « victoire », la Dumbéenne décroche sa licence. « Ma plus grande satisfaction est d’avoir aligné toutes les années, sans redoubler. » La maman se donne alors une année de pause pour ses fils et effectue des jobs alimentaires. Mais Sylvia a encore des rêves plein la tête. « Je réfléchis à m’envoler vers la Métropole avec mes enfants pour passer un master qui me permettra de devenir animatrice de patrimoine, un métier qui me tient à coeur. Des aides existent, c’est possible ! Je ne lâche rien ! »

Aurélien Pol

 

BIO EXPRESS

8 mars 1984 : naissance à Port- Vila, au Vanuatu.

1987-2004 : scolarité à l’Ecole française du Vanuatu.

2006-2007 : elle intègre l’Ecole de la seconde chance du Vanuatu et obtient son diplôme d’accès aux études universitaires (DAEU).

2008-2009 : entre en licence d’histoire à l’université de la Nouvelle- Calédonie.

2010 : la Vanuataise emménage à Dumbéa et effectue une pause dans ses études.

2011 : Sylvia a son premier enfant, Wamaïti.

2015-2017 : elle reprend ses études et décroche sa licence d’histoire à l’UNC.